Projet de lutte et de protection des femmes contre les violences basées sur le genre
L’objectif global du projet , « Lutte et protection des femmes contre les VBG : en Ituri», en sigle PLCVI, est de contribuer à la réduction des Violences Basées sur le Genre (VBG) à travers l’adoption d’attitudes et de normes socioculturelles respectant l’égalité des sexes, le renforcement du pouvoir et de la résilience des survivant(e)s à travers une prise en charge holistique . Le projet adopte une approche globale basée sur la promotion et le respect des droits des femmes et des filles et s’inscrit dans une perspective d’institutionnalisation et de durabilité de l’action. En effet, grâce à une approche basée sur « Communication pour le Changement de Comportement » (CCC) le projet ambitionne d’initier des changements clés au niveau des comportements et
des normes socioculturelles afin de réduire durablement les VBG. A travers les campagnes de sensibilisation, l’engagement actif des leaders communautaires, des organisations féminines et des survivant(e)s comme actrices de changement, les communautés sont appelées à adopter des attitudes respectueuses et promotrice de l’égalité des sexes. En outre, il s’agit de répondre à travers une prise en charge holistique (médicale, psychosociale, juridique, réinsertion socioéconomique) aux besoins des survivant(e)s de VBG afin de mitiger les conséquences de ces violations et la vulnérabilité des survivant(e)s. Les Centres Intégrés de Services Multisectoriels (CISM) apparaissent comme le mécanisme de réponse aux VBG le plus efficace ; les mécanismes communautaires d’alerte et de protection sont les relais clés entre la prévention des VBG et la réponse aux violations. Dans une perspective de durabilité et d’appropriation.
Dans ce cadre, les Objectifs spécifiques du Projet sont :
• Soutenir l’engagement des hommes, des femmes et des jeunes ainsi que des communautés à adopter des attitudes et des normes sociales et culturelles respectueuses de l’égalité des sexes et à contribuer à la lutte contre les VBG;
• Renforcer le pouvoir et la résilience des survivant(e)s de VBG et des parents des survivant(e)s mineur(e)s à travers la consolidation et le développement de mécanismes de prise en charge holistique comme les CISM et d’autres structures d’offre de services ainsi qu’à travers la mobilisation des réseaux communautaires d’alerte, de prévention et de réponses aux VBG
CONTEXTE DU PROJET
Pays au cœur de l’Afrique avec une population estimée à 86 millions d’habitants (2016), la République Démocratique du Congo (RDC) s’étend sur une superficie de 2.345.900 Km2. Le pays dispose d’immenses ressources naturelles, mais est depuis plusieurs décennies en proie à des cycles de conflits et de violence. L’Est du pays correspond à un théâtre de conflits récurrent faisant des millions de victimes; aucune paix durable n’a réussi à s’enraciner jusqu’à présent. Plus récemment, un conflit coutumier dans la province du Kasaï Central déclenché en aout 2016 a provoqué une crise, touchant au moins 7 provinces environnantes. À cause du conflit, plus de 1,4 millions de personnes se sont déplacées à l’intérieur du pays et au moins 31 242 ont traversé les frontières pour trouver refuge dans les pays voisins, dont l’Angola. Selon l’Organisation des Nations Unies (ONU), la RDC est le pays Africain avec le plus grand nombre de réfugiés (environ 780 000 réfugiés) et de déplacés internes (environ 3,8 millions). Au niveau juridique, le gouvernement congolais a édicté un ensemble de règles pénales et civiles pour organiser et réguler les rapports entre les sexes. Par ailleurs, il a ratifié plusieurs instruments internationaux et régionaux visant l’égalité des sexes, l’amélioration du statut et de la santé de la femme, et la protection des enfants. Sur le plan national, l’instrument de base est la Constitution de la République Démocratique du Congo du 18 février 2006, dans ses articles 12, 13, 14 et 15 qui prône :
1. L’égalité de tous devant la loi ;
2. L’accès sans discrimination à l’éducation et aux fonctions publiques ;
3. L’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard de la femme et la protection de ses droits ;
4. La lutte contre toutes les formes de violences faites à la femme ;
5. Le droit de la femme à une représentation équitable au sein des institutions nationales, provinciales et locales ;
6. L’élimination des violences sexuelles. Par ailleurs, des lois ont été votées et promulguées. C’est le cas du code de la famille révisée en 2016, de la Loi n° 06/018 du 20 juillet 2006 modifiant et complétant le décret du 30 janvier 1940 portant Code Pénal Congolais et de la Loi n° 06/019 du 20 Juillet 2006 modifiant et complétant le décret du 06 août 1959 portant Code de procédure Pénale.
Ces deux dernières lois renforcent la répression en matière de viol et de violences sexuelles. C’est aussi le cas de la loi n° 09/001 du 10 janvier 2009 portant protection de l’enfant.
Cependant ; Les conflits en RDC ont principalement affecté les femmes et les enfants qui sont parmi les populations les plus représentées dans les camps de réfugiés et de déplacés internes (plus de 75%). Les femmes et les jeunes filles sont alors exposées à une très grande vulnérabilité.
PROBLEME à RESOUDRE
1. Genre, inégalité entre les sexes et violence en République Démocratique du Congo
Les femmes représentent plus de 50% de la population congolaise. Mais, la RDC est parmi les
derniers pays au monde dans la classification sur l’égalité entre les sexes. Selon l’index sur
l’inégalité entre les sexes publié dans le dernier rapport sur le développement humain du
PNUD (2016), la RDC se classe 153ème sur 1595. D’autres instruments d’évaluation de
l’égalité des sexes dans le pays confirment la situation préoccupante quant à l’intégrité
physique des femmes et des filles, l’accès limité aux ressources et services ainsi que la Les
femmes représentent plus de 50% de la population congolaise. Mais, la RDC est parmi les
derniers pays au monde dans la classification sur l’égalité entre les sexes. Selon l’index sur
l’inégalité entre les sexes publié dans le dernier rapport sur le développement humain du
PNUD (2016), la RDC se classe 153ème sur 1595. D’autres instruments d’évaluation de
l’égalité des sexes dans le pays confirment la situation préoccupante quant à l’intégrité
physique des femmes et des filles, l’accès limité aux ressources et services ainsi que la
restriction des libertés civiles des femmes. Les inégalités entre les sexes sont particulièrement
présentes dans l’ensemble des domaines économiques, politiques, sociaux et culturels.
Certains changements sociaux et économiques ont lieu au sein de la société congolaise ces
dernières années et favorisent l’émancipation et l’autonomisation de la femme. En effet, la
participation à des activités économiques informelles permet aux femmes congolaises
d’opérer un renversement des rôles économiques et sociaux au sein du couple. Cependant,
malgré ces avancées et également la modification du Code de la Famille, la RDC continue à
faire face à des obstacles majeurs pour atteindre l’égalité entre les sexes. Les femmes ne
jouissent pas encore pleinement de leurs droits et sont victimes de nombreux actes de
violences basées sur le genre.
3.2.2 Les VBG en RDC
Les VBG correspondent à un phénomène social global à l’ensemble de la société ; il s’agit de
la matérialisation violente de l’ensemble des discriminations entre les hommes et les femmes.
En effet, les différents acteurs impliques dans la prise en charge multisectorielle des
survivant(e)s de VBG font état d’environ 20 000 cas de VBG traites par an en RDC ; entre
janvier et juin 2017, 4 700 cas ont été répertories. La moitie sont mineur(e)s au moment des
faits. Les mariages précoces et/ou forces sont les formes de VBG qui prévalent en RDC.
Les viols/violences sexuelles correspond au type de VBG le plus prévalent en RDC ; les
victimes sont principalement les femmes (98%). En effet, un peu plus d’une femme sur cinq
(23%) a été forcée physiquement a avoir des rapports sexuels avec son mari/partenaire alors
qu’elle ne le souhaitait pas. On estime aussi que 64% des adolescentes subissent une initiation
sexuelle forcée ou ont vécu leur première relation sexuelle de façon non consensuelle. Selon
l’EDS, les femmes âgées de 20-29 ans ont été le plus fréquemment violentées.
Parmi les femmes ayant subi des violences sexuelles, 66% d’entre elles sont en rupture
d’union et 60% ont un niveau d’instruction primaire. Les taux les plus élèves de violences
sexuelles du pays ont été enregistres dans les anciennes provinces de Kasaï Oriental et
Occidental, ou plus des deux tiers des femmes sont concerné.
En effet, l’incidence des violences domestiques au sein de la société congolaise est
particulièrement importante. 46% des femmes en union ou en rupture d’union ont subi à un
moment ou a un autre des actes de violence physique de la part de leur mari/partenaire ; 40%
ont reçu des gifles.
Plus que la violence physique, les hommes font également preuve de violence psychologique
(humiliation, injures, attitude dégradante, chantage financier…) envers les femmes afin de
renforcer ce statut de domination. 37% des femmes déclarent avoir subi une violence
émotionnelle et 27% de celles-ci affirment avoir été insultées et dénigrées. Malgré la
législation qui interdit les mariages d’enfants de moins de 15 ans, les mariages
précoces/forcés demeurent une pratique courante dans de moins de nombreuses provinces
(particulièrement dans les zones rurales). « En RDC, les jeunes filles font face à toutes sortes
de pressions économiques et culturelles qui les poussent a une sexualité précoce. Dans
certaines régions de la RDC, des petites filles sont promises a des hommes des leur naissance
ou dès leur plus jeune enfance ; dès leurs premières menstruations, le mariage est célébré». La
grande majorité des jeunes filles âgées de 15 à 19 ans sont déjà mariées et parfois même
mères. En 2016, UNICEF a relevé 37% de mariage d’enfants (mariage avant l’âge de 18 ans
dont 10% avant l’âge de 15 ans). Les mariages sont décidés par les parents de la famille de la
jeune fille et du garçon/homme ; la notion de consentement n’existe pas. En outre, dans
certaines provinces notamment au KASAI, et même en ITURI, il est devenu répandu que des
jeunes filles soient enlevées dans le but d’être mariées de force a leur ravisseur.
Les VBG sont ancrées dans des normes socioculturelles, des traditions et croyances, mais
également causées par des insuffisances institutionnelles et des situations de violence
prolongée
Des normes socioculturelles patriarcales instaurant un rapport de domination de l’homme sur
la femme :
Les VBG en RDC sont largement ancrées dans certaines normes socioculturelles, traditions,
coutumes et autres croyances. En effet, la société congolaise a embrassé une structure
patriarcale qui de fait place la femme en position de subordination à l’homme. Le plus récent
profil genre de la RDC (2014) explique que les femmes sont rarement considérées comme «
des êtres a part entière », mais sont définies par rapport a l’homme, en qualité de mère, épouse
ou filles. En effet, les femmes sont affectées a une fonction familiale et reproductrice alors
que l’homme est le chef de famille habilité à prendre des décisions et a intervenir dans la
sphère privée et publique. Dans la majorité des cas étudiés, l’homme est le responsable des
dépenses du ménage (vêtement/nourriture/gros investissement) et du choix des fréquentations.
Le Code de la Famille (avant révision) par exemple affirmait que l’homme était le chef de
famille et femme lui devait obéissance ou encore prescrivait que les femmes devaient
demander l’autorisation de leurs maris pour signer tout acte juridique.
En outre, l’inégalité entre les sexes est justifiée à travers le discours religieux et l’ensemble
des stéréotypes présentant les femmes comme des êtres physiquement et psychologiquement
faibles. La valorisation de la virginité, de la réputation et de l’honneur de la famille (pour ne
citer que ceux-là) renforce la position de subordination de la femme par rapport aux hommes,
mais également au groupe familial/social. La femme n’est ni autonome, ni indépendante et ni
maitre de son corps.
De manière globale, tout un ensemble de normes socioculturelles, de traditions et coutumes
régissant les relations régissant les relations sociales au sein des communautés sont
conductrices de VBG et maintiennent les femmes dans une situation de dépendance et de
subordination par rapport aux hommes. Les femmes font ainsi face à des discriminations
structurelles ancrées dans les fondements de la société et des relations sociales. Ainsi, certains
comportements, tels que les violences domestiques ou bien la soumission De la femme à
l’autorité de l’homme, sont intériorisés comme une pratique normalisée et justifiée.
La valorisation de la virilité masculine et banalisation de la violence :
La virilité et la masculinité sont extrêmement valorisées dans la société congolaise ;
l’effectivité du rapport de domination de l’homme sur la femme apparait comme une preuve
sociale de l’expression de la masculinité et de la virilité. La force physique est ainsi
considérée comme un moyen d’affirmation de l’identité masculine qui est intériorisé par les
hommes et par les femmes. L’Enquête démographique de Sante (2013-2014) montre en effet
que 75% des femmes contre 61% d’hommes pensent qu’il est justifié pour un homme de
battre sa femme. La violence domestique est largement banalisée et considérée comme un
moyen « d’éducation de la femme » mais surtout de preuve de la soumission de la femme à
son mari.
La sexualité correspond à l’expression de la masculinité/virilité par excellence. Certains
affirment même qu’un rapport sexuel a besoin d’une certaine dose de violence sinon le
sentiment de puissance de l’homme ne peut être atteint. Sexualité, masculinité, domination et
violence sont ainsi entremêlées. Ce rapport de domination est intériorisé par les femmes
puisque certaines considèrent les rapports sexuels comme une obligation conjugale – la notion
de viol conjugal ne peut alors pas exister. De même, il existe de nombreux stéréotypes quant
aux besoins sexuels supérieurs de l’homme ou quant à l’expression de ces désirs. La sexualité
apparait comme le domaine réservé à l’homme afin d’exprimer sa puissance et sa virilité.
Les hommes sont également victimes de VBG, mais le nombre de cas rapporté est
particulièrement limité en raison du tabou autour des relations homosexuelles, mais également
de la perception de la perte de virilité et de masculinité faisant suite à cette agression.
Les années de conflit ont conduit à la multiplication des cas de violences sexuelles à travers
l’utilisation massive du viol comme « arme de guerre » en raison de son pouvoir
d’humiliation et renforcement des ressentiments intercommunautaires. L’augmentation de la
violence structurelle et visible dans les centres-villes a également conduit à la multiplication
des violences et agressions sexuelles utilisées comme arme punitive par des gangs ou bandes
criminels. La banalisation de la violence et des armes blanches à des répercussions directes
sur les rapports au sein des foyers. Ainsi des enfants qui ont grandi dans un environnement
violant ont un seuil de tolérance plus élevé à la violence et considèrent l’exercice de la force
physique comme un moyen de se faire respecter et d’affirmer une certaine autorité.
Vulnérabilité socioéconomique et faiblesse de la gouvernance autant d’obstacle a l’accès aux
services publics : En plus des fondements socioculturels, la situation socio-économique
précaire, la faiblesse des autorités étatiques et de la gouvernance correspondent à des facteurs
conducteurs de VBG et renforcent les inégalités entre les sexes. Les femmes font très souvent
face a une précarité économique qui a des incidences directes sur son accès a d’autres services
comme la sante, la justice ou l’éducation. La combinaison de ces facteurs et verbes
particulièrement perverse car ils se renforcent mutuellement plaçant les femmes dans une
situation d’extrêmes vulnérabilité. La RDC est caractérisée par une féminisation de la
pauvreté, puisque 61,2% des femmes vivent en dessous du seuil de la pauvreté contre 59,3%
des hommes. Cette proportion est même encore plus élevée dans les milieux ruraux et semiurbains. Seulement 2,8% des femmes exercent une activité salariée contre 12% pour les
hommes ; elles travaillent majoritairement dans l’agriculture traditionnelle et le secteur
informel. La précarité Socioéconomique des femmes est causée par les discriminations quant
à l’accès aux terres, la propriété de biens immobiliers, l’ouverture de compte bancaire ou
encore la succession matrimoniale. En effet, les lois coutumières affirment que seuls les
hommes héritent au décès d’un membre de la famille laissant la veuve dans une grande
précarité financière. Discriminations sont beaucoup plus marquées dans les zones rurales et
défavorisées. Les lois coutumières sont à l’origine des discriminations faites aux femmes; la
vulnérabilité socioéconomique constitue un frein à l’émancipation et l’autonomisation des
femmes mais également un obstacle à l’accès aux soins médicaux, judiciaires et d’éducation.
De même, la faiblesse de la gouvernance en RDC, visible à travers une absence
d’infrastructures et de services sociaux, renforce les inégalités entre les sexes. L’accès aux
services sociaux, médicaux, judiciaires et d’éducation est jonché d’obstacles, particulièrement
dans les zones reculées. Les femmes éprouvent encore plus de difficultés d’accès en raison de
leur faible pouvoir socioéconomique et de leur dépendance vis-à-vis de leur mari/père. Ainsi,
les besoins des membres masculins de la famille sont très souvent privilégiés par rapport à
ceux des femmes et des filles.
Selon l’étude de KAYIBA, « une plus grande priorité est accordée à la scolarisation des
garçons au détriment de celle des filles dont l’éducation est plutôt orientée vers des activités
domestiques et le soin des enfants. L’envoi des filles à l’école est confronté à des défis
énormes, surtout en milieu rural, principalement à cause des mariages précoces et du poids
des activités domestiques. Même lorsque les filles sont inscrites à l’école, ce qui est désormais
la règle, elles ont moins de chance de réussir. Les filles sont beaucoup moins présentes dans
l’enseignement secondaire et supérieur. Elles font aussi face au harcèlement sexuel de certains
enseignants ». Il existe une corrélation entre le niveau d’éducation des femmes et des hommes
et la prévalence des VBG à l’encontre des femmes. En effet, le manque d’éducation des filles
et des femmes favorise les grossesses précoces et non désirées, les mariages précoces et/ou
forcés ainsi que les violences sexuelles. Au sein de la société congolaise, il y a une forte
ignorance quant aux droits de la femme et aux VBG (excepté le viol) qui est principalement
due à un manque d’éducation primaire mais également d’éducation à la vie et de
sensibilisation, notamment par rapport à la notion de consentement. Cette ignorance des droits
et du cadre légal contribue à la perpétuation de VBG.
. De manière encore plus accrue, l’accès aux institutions judiciaires est restreint par des
normes socioculturelles qui imposent un tabou sur certaines pratiques/crimes qui doivent
rester du domaine du privé et non être publicisé devant un juge, même traditionnel. Par peur
de représailles, de discriminations et même d’exclusion de la part de leur
famille/communauté, de nombreuses femmes ne dénoncent pas les violences subies créant
une véritable culture de l’impunité en matière de VBG.
En outre, de très nombreux magistrats et avocats ont une connaissance très limitée des droits
des femmes et des textes condamnant les violences sexuelles et les VBG qui sont alors
appliqués de manière subjective et inconsistante sur l’ensemble du territoire de la RDC. Les
VBG ne sont pas souvent reconnues en tant que violations des droits de la femme et les juges
renvoient souvent les cas de violence domestique à des mécanismes traditionnels de
résolution de conflit afin de trouver un arrangement à l’amiable.
Les conséquences directes des discriminations faites aux femmes :
Les VBG et la faiblesse institutionnelle constituent une menace directe pour la vie des
femmes. En effet, alors que le manque d’éducation représente un facteur conducteur de VBG,
les difficultés d’accès aux soins médicaux constituent un danger vital pour les femmes. En
effet, les grossesses précoces sont une source de mortalité importante. Selon l’UNFPA, les
décès maternels sont 28% plus élevés chez les adolescentes que chez les femmes de 20 à 24
ans. Ils sont la conséquence directe de grossesses précoces, de mariage d’enfants, de pratiques
sexuelles dangereuses et de soins inadaptés durant la grossesse. En effet, les filles âgées entre
15 et 20 ans ont deux fois plus de mourir en couche que celles qui ont 20 ans et plus. Pour les
filles âgées de moins de 15 ans, ce risque est 5 fois plus élevé. L’absence d’éducation sexuelle
et de service de planning familial ainsi que la faiblesse des structures médicales adaptées
expliquent ce taux de mortalité. En outre, les avortements clandestins réalisés dans des
conditions d’hygiènes insalubres représentent une seconde cause de mortalité. De plus, les
violences sexuelles, les mariages précoces et/ou forcés et l’existence d’un rapport de
domination entre les hommes et les femmes, particulièrement prévalent dans la sexualité, sont
à l’origine de la diffusion de maladie Sexuellement transmissible. Les femmes sont très
souvent infectées mais ne parviennent pas à accéder aux soins adéquats et services de
dépistages ce qui représente un danger vital pour elles.
3.2.3. La VBG dans la province de l’Ituri
La province de l’Ituri est particulièrement affectée par les VSBG. En effet, elle a enregistré
440 cas de VSBG, Les violences sexuelles correspondent à la forme de VBG la plus
répandue; ainsi en Ituri, 81,9% des cas rapportés de VBG correspondent à des viols.
« Ampleur des violences sexuelles et basées sur le genre en Ituri et facteurs socioculturels.
L’une des causes majeures de l’importante incidence de violences sexuelles en Ituri
correspond aux conflits armés qui font rage depuis plusieurs décennies. En effet, le viol et
autres violences sexuelles sont désormais utilisés comme arme de guerre et d’intimidation.
Utilisé par les différents groupes armés ainsi que quelques éléments de l’armée nationale, le
viol vise à punir les femmes mais en réalité les communautés dans leur globalité. L’ensemble
des communautés valorisent particulièrement la virginité des femmes ainsi que les notions
d’honneur familial; les violences sexuelles visent à détruire ces valeurs et ainsi à briser
l’ensemble des relations sociales au sein des communautés.
Certaines normes socioculturelles et traditions demeurent particulièrement prégnantes en Ituri
et contribuent à la perpétuation de VBG comme la violence domestique particulièrement
présente au sein des foyers, et les mariages forcés et/ou précoces qui représente 18,6% des cas
de VBG rapporté en Ituri.
3.2.4 Conclusion :
La force des traditions et coutumes affirmant les inégalités entre les sexes, la faiblesse
institutionnelle ainsi que la méconnaissance des femmes sur leurs droits et les services offerts
constituent autant de raisons d’explication à la prévalence des VBG au sein de la société
congolaise. L’ensemble des causes structurelles, sous-jacentes, institutionnelles des VBG sont
intimement liées les unes aux autres et se renforcent mutuellement. En effet, certaines
pratiques sociales favorisant la commission de VBG ne sont pas dénoncées en raison d’autres
normes socioculturelles, de la précarité socioéconomique de la victime et de la faiblesse des
institutions et des services publics. L’impunité en matière de VBG contribue à la prévalence
des VBG au sein de la société. Il s’agit désormais d’adresser les racines socioculturelles
conductrices de VBG mais également de condamner socialement et juridiquement ces
violences en favorisant l’accès aux services sociaux, judiciaires, médicaux et de
développement économique.
Comme décrit précédemment, les VBG touchent l’ensemble de la société congolaise, seule
leur nature et incidence varient d’une province à une autre.
En égard à tous ces qui précédents, l’organisation non gouvernementale nationale sans but
lucratif, apolitique et non confessionnelle à vocation régionale dénommée : vision globale : en
sigle : « VIGLOB. » Prend l’engagement d’accompagner les femmes et les jeunes filles
congolaises en générales dans la lutte contre la violence basée sur le genre, mais en
commençant par les femmes et les filles Ituriennes qui retiennent plus l’attention à cause de
la situation d’insécurité notoire.
Section IV. Vue d’ensemble du projet
4.1. Le passif de la lutte contre les VBG
Très souvent en Ituri, la problématique du « genre » est limitée à celle de la lutte contre la
violence sexuelle. Ces tendances entravent l’émancipation de la femme et doivent être prises
en considération lors de la planification des programmes d’aide humanitaire et de
développement en Ituri. Le profil genre décrit une femme congolaise traitée comme un objet
de charité, et non comme titulaire de droits ce qui a une influence importante dans l’exercice
de la citoyenneté de chacune. Au regard des politiques, on remarque souvent une absence
d’appropriation et de priorisation de la problématique du « genre » par la population et les
élites locales et provinciales. Bien que Les politiques nationales sont transmises de Kinshasa
dans les provinces Sans les capacités requises pour leur mise en œuvre, ni une participation
suffisante des femmes au niveau local ni central. L’action est ainsi considérée en faveur de
l’égalité des sexes, indépendamment du fait que ces politiques et programmes aient un
véritable impact ou non sur les conditions de vie des femmes ou sur l’application effective de
leurs droits.
De plus, de nombreuses actions sont fondées sur la conception que la femme est une mère et
sur des suppositions quant au comportement approprié pour une femme. Les acteurs non
étatiques sont indispensables pour la prestation des services. Les analyses pour les
programmes et projets se basent sur des données statistiques qui ne sont pas toujours fiables.
Même si certaines données existent, il est difficile de démontrer des changements qualitatifs
positifs dans la vie des femmes. Finalement, le profil genre de la RDC souligne la tendance à
avoir une image exagérément optimiste de la problématique du « genre » réduisant les efforts
en la matière à la lutte contre violence sexuelle qui est une problématique essentielle pour
l’avancement de l’égalité mais n’est pas l’unique aspect pour aboutir à une égalité des sexes.
Malgré l’adoption de nombreux instruments légaux affirmant l’égalité des sexes et
promouvant les droits des femmes, certaines coutumes et traditions en Ituri persistent et
favorisent les VBG. Il s’agit désormais de parvenir à l’application des textes juridiques de
manière cohérente et uniformisée sur l’ensemble du territoire et de mettre fin à ces pratiques
coutumières. Une approche holistique visant à changer les comportements sur le long terme
afin d’affirmer la femme comme citoyenne de plein droit et actrice de la vie sociale et
politique congolaise. Consiste à mettre fin :
•à la Violences liées aux conflits armés : viols, esclavage sexuel, contamination massive au
VIH, grossesse non désirée, destruction des organes génitaux…
•à la Violences sexuelles commises dans les zones hors conflit : viols, inceste, harcèlement
sexuel, prostitution forcée, mutilation génitale…
•à la Violences socioéconomiques et culturelles : maltraitances des veuves, spoliation des
orphelins, mariage précoce.
4.2 CADRE LOGIQUE DU PROJET
4.2.1 L’objectif global
L’objectif global du projet est de contribuer à la réduction des Violences Basées sur le Genre
(VBG) à travers l’adoption d’attitudes et de normes socioculturelles respectant l’égalité des
sexes, l’amélioration de la prise en charge holistique des survivant(e)s et le renforcement de la
coordination au niveau national dans une perspective d’appropriation nationale.
De manière globale, le programme ambitionne d’avoir un impact à trois niveaux :
Au niveau individuel : La connaissance individuelle des hommes et des femmes sur
les droits des femmes et jeunes filles, sur les VBG et l’égalité des sexes est renforcée à
travers des campagnes de sensibilisation et d’information. Les capacités d’agir et de
décisions des femmes sont également développées grâce à la mobilisation et
l’engagement des acteurs/actrices de changement en faveur de l’égalité des sexes et de
la masculinité positive. Les survivant(e)s de VBG bénéficient de services différents et
complémentaires qui visent à renforcer leurs capacités d’actions et leur résilience et à
réduire leur vulnérabilité socioéconomique.
Au niveau social/communautaire : Les systèmes communautaires de dialogue et de
soutien existants sont renforcés par des mécanismes d’alerte, de prévention et de
protection afin de mettre en œuvre de manière efficace et holistique la lutte contre les
VBG. Les communautés sont mobilisées à travers des acteurs/actrices de changement
afin d’abandonner des normes socioculturelles et traditions conductrices de VBG et
adoptent de nouvelles attitudes respectueuses de l’égalité des sexes. Les communautés
se mobilisent activement dans la prévention des VBG et dans la réponse aux VBG à
travers l’orientation des survivant(e)s vers les structures d’accueil et de services mais
également dans le non stigmatisation des survivant (e)s.
Au niveau institutionnel : Les institutions publiques et les organisations de la société
civile sont sensibilisées et appuyées afin de servir de relais d’information auprès des
populations sur les VBG, d’adopter des réformes législatives et institutionnelles, et
afin de mieux faire connaître et respecter les lois et les réglementations en vigueur. La
coordination des interventions en matière de lutte contre les VBG est renforcée à
travers l’instauration de mécanismes spécifiquement dédiés et la collecte de données
favorisant l’analyse stratégique. Par conséquent, leur crédibilité et leur efficacité en
termes de prévention et de réponses aux VBG sont renforcées.
4.2.2. Les Objectifs spécifiques du projet sont :
Soutenir l’engagement des hommes, des femmes et des jeunes ainsi que des
communautés à transformer les normes sociales et culturelles défavorables à l’égalité
des sexes et à promouvoir la lutte contre les VBG;
Renforcer le pouvoir d’agir et les capacités de résilience des survivant(e)s de VBG à
travers une prise en charge holistique au sein des CSIM et d’autres mécanismes de
référencement et contre référencement et la mobilisation des réseaux communautaires
d’alerte, de prévention et de réponses aux VBG.
4.2.3. Stratégie /CADRE D’INTERVENTION du projet
Le programme a pour objectif principal de réduire l’incidence des VBG en Ituri en adoptant
une approche globale basée sur la promotion et le respect des droits des femmes et des filles et
s’inscrivant dans une perspective d’institutionnalisation et de durabilité de l’action.
De manière transversale, le projet vise à accroître et à améliorer la responsabilité individuelle
et collective des femmes et à permettre aux femmes de s’affirmer comme actrice de son
autonomisation sociale, économique et judiciaire. Il s’agit de donner une place centrale aux
femmes au sein de la lutte contre les VBG.
Pour atteindre ces objectifs, ce Projet devrait s’articule autour de deux composantes
complémentaires et holistiques: Mais la composante prévention est prise en compte dans un
premier temps et la deuxième va suivre.
Prévention – Transformation des comportements et normes socioculturelles
À travers sa composante « prévention », VIGLOB ambitionne d’adresser les facteurs
structurels vecteurs des VBG, c’est-à-dire à initier une transformation des normes
socioculturelles, des traditions, coutumes et autres croyances qui sont à la cause directe ou
indirecte de VBG.
VIGLOB développe à travers ce projet une approche de prévention des VBG basée sur la
théorie CCC qui repose sur l’engagement actif des populations ciblées et l’appropriation des
thématiques et des objectifs visés par ces-dernières.
Un travail premier de sensibilisation, de partage d’information et d’éducation est réalisé au
sein des communautés afin d’informer les populations largement. Les lois et politiques sur
l’égalité et l’équité du genre sont vulgarisées auprès des communautés et des campagnes
d’éducation et de sensibilisation sur les droits des femmes sont menées.
En complément, des leaders communautaires et des acteurs/actrices de changement sont
identifiés au sein des communautés afin de promouvoir l’égalité entre les sexes et la
masculinité positive. Il s’agit d’initier des réflexions au sein des communautés sur l’ensemble
des normes socioculturelles existantes, sur la position et le rôle des femmes dans la
communauté. Le but est d’initier une transformation profonde des normes socioculturelles et
coutumes vecteurs de VBG.
En outre, les réseaux communautaires sont appuyés et renforcés afin de mettre en œuvre des
réseaux d’alerte, de prévention et de protection opérationnels. De même, les leaders
communautaires, les organisations féminines et les survivant(e)s sont mobilisées et appuyées
dans leurs initiatives comme acteurs/actrices de changement au sein des communautés. Elles
sont également renforcées en vue de participer activement et efficacement à la coordination de
la lutte contre les VBG.
4.2.4. Les résultats attendus produits et activités du projet.
Le projet de lutte contre les VBG est normalement articulé autour de 2 composantes ; mais
VIGLOB met d’abord l’accent sur la composante prévention.
Effet du projet : Réduction de l’incidence des VBG par la transformation des normes
socioculturelles dans les communautés ciblées.
Produit 1.1 : Les communautés ciblées adoptent des attitudes et des normes socioculturelles
qui soutiennent l’égalité entre les sexes et la lutte contre les VBG.
Activités prévues :
Promouvoir l’engagement positif des leaders communautaires en faveur de la
masculinité positive et de l’égalité entre les sexes ;
Promouvoir des discussions à la base sur les mécanismes communautaires de
prévention, de référencement et gestion des VBG ;
Appuyer la conception et la production des supports de communication pour le
changement de comportement en faveur de l’égalité des sexes et de lutte contre les
VBG ;
Renforcer les capacités des survivant(e)s à devenir acteurs / actrices de changement
dans la prévention et la réponse aux VBG ;
Appuyer la vulgarisation des instruments internationaux en matière de SGBV en
l’occurrence les Résolutions 1325, 1820, 1960, de la CEDEF, du Beijing, de l’EPU,
etc ;
Appuyer l’utilisation des NTIC pour la sensibilisation, la prévention, l’alerte et le
référencement des cas de VBG.
Produit 1.2 : Des mécanismes communautaires de prévention, d’alerte, de référencement et
protection contre les VBG sont mis en place et fonctionnels au niveau local, territorial,
provincial.
Activités prévues :
Appuyer la mise en place et le fonctionnement des mécanismes communautaires de
prévention, alerte, référencement, protection des survivant(e)s des VBG ;
Renforcer les capacités des structures et associations à base communautaire chargés de
la prévention, alerte, référencement, protection des survivant(e)s de VBG ;
Appuyer la vulgarisation du plan d’action contre les mariages précoces ;
Renforcer le mécanisme d’alerte précoce des réseaux de protection communautaires ;
Conduire une étude sur l’utilisation du langage dans la société, les médias et la
communication publique en RDC permettant de travailler sur les facteurs déterminants
influençant ce langage.
Produit 1.3 : Les organisations et collectifs des femmes sont renforcés dans leur rôle
d’acteurs de l’alerte, la prévention et la réponse aux VBG ainsi que dans la coordination de
la lutte contre les VBG.
Activités prévues :
Appuyer les collectifs cibles, les organisations féminines engagés dans la lutte contre
les VBG au niveau de la prévention et de la prise en charge;
Former ces collectifs et organisations aux NTIC afin de favoriser la sensibilisation,
diffusion et partage des messages, informations, expériences et alertes contre les VBG;
Appuyer les activités d’échanges entre les pairs (peer to peer exchanges) au niveau des
collectifs dans la lutte contre les VBG;
Appuyer les collectifs et organisations féminines dans la mise en œuvre d’un plaidoyer
continu et cohérent pour l’amélioration du cadre légal et de la prise en charge;
Renforcer les capacités des organisations féminines afin de garantir leur participation
effective aux réunions de coordination de la lutte contre les VBG.